Ca va devenir rituel : je m'offre une petite indisposition ici chaque fois que je rentre de l'Inde . Façon d'atterrir , de laisser place à cette partie nostalgique de mon ego *qui regrette infiniment l'excitation du voyage et surtout l'accueil en ces lieux bénis , Tiruvannamalaï ou Pondichery , qui apaisent les coeurs déchirés par les empreintes débiles de l'enfance. Bref , outre les brûlures sur le ventre qui commençaient à guérir tant que j'étais là bas , et ne sont devenues une gêne qu'une fois rentrée ici , me voilà aphone , le tissu  de mes cordes vocales a été remplacé par du  carton raide et douloureux  . Je me soigne au tchaï dont j'ai rapporté quelques gros paquets ici , ayant fait une razzia chez Nilgiri . Cette nuit j'ai rêvé que je campais à la lisière de la forêt , en Inde ; je retrouvais là une amie qui , dans la réalité , vient de subir plusieurs deuils  . Elle se détournait et ne me parlait pas .
        Il y a un film que j'ai beaucoup aimé , je ne l'ai vu qu'une fois : Mystic River **. A cause du titre , de l'intrigue ( le décès accidentel d'une jeune fille , qui  entraîne le père de la jeune fille , mafieux local , à exécuter sans états d'âme excessifs  l'ami qu'il croit , à tort , être l'assassin  ) ;  parce qu' y sont sobrement évoqués  les fils qui tirent en profondeur les personnages ancrés dans leurs enfances entremêlées ; à cause du contraste entre ce titre , nom fabuleux d'une rivière ( à Boston ? je crois ) et le quartier populaire qu'il décrit , bourré de vie et de vies humaines foisonnantes et diverses ,  agité de souffrances et  de gaietés entremêlées ; et à cause surtout d'un personnage qu'on entrevoit à peine et qui hante longtemps :  la femme d'un policier , qui l'a quitté en laissant la blessure ouverte , mais  lui téléphone quelquefois , sans laisser passer dans l'écouteur les quelques mots silencieux qu'elle chuchote de mqnière inaudible .


* un aspect pas très glorieux , dépressif ,désespéré et régressif tant qu'on veut ,  qui ne vit bien que la tête sous les couvertures ... je crois qu'il est temps que je me remette à lire Proust , en plus avec toute cette pluie qui tombe , c'est la lecture idéale .
** de Clint Eastwood