Résumé des tribulations :
Départ pour Nice Mercredi matin , lent et pénible , je m'emberlificotais dans tout ce que je voulais faire avant de partir . Philippe m'a accompagnée pour vérifier la pression de mes pneus ( j'ai la ferme intention d'apprendre à faire ça toute seule , c'est tout con , je sais le faire en principe , mais chaque fois je lui demande de m'accompagner pour vérifier que je m'y prends bien ). Je me sens quand même assez horripilée par ledit Philippe .
Puis trajet jusqu'à Saint-Martin de Crau , environ une heure et quart de route et autoroute assez encombrées ; et c'est alors que je me rends compte que j'ai oublié le sacro-saint cartable noir qui contient tous les papiers , chéquiers , machins de la tutelle ... youpi ! et également mon chéquier .
Sortie juste avant l'autoroute , rond-point , et zou ! départ dans l'autre sens . Youpi .
Trajet en sens inverse jusqu'à la maison , le moral plus bas que bas et encore plus bas que ça voui .
Arrivée chez moi ; je récupère le fameux cartable , constate que j'ai aussi oublié mon carnet de chèques personnel ... je cherche une bonne demie-heure en me demandant où j'ai foutu le sacré truc , et puis je téléphone aux CCP parce que je ne me souviens plus quand j'ai reçu mon dernier . Au bout d'une dizaine de minutes , je suis en contact avec une charmante dame qui me dit qu'ils me l'ont envoyé le 10 Mars .Et qu'il n'est pas encore arrivé .
A midi , après un bon petit café bien tonique et pas de repas pour cause d'appétit coupé , nouveau départ . J'emporte un sandwich et de l'eau , tout de même . Préparés depuis le matin , bien sur .
Vers les cinq heures ( j'ai fait une petite sieste sur une aire d'autoroute , et puis il y avait un bouchon en arrivant ) je me retrouve enfin à destination - complétement naze et hallucinée . Maman va bien , ravie de me voir comme toujours , M. est un peu à bout de nerfs , toujours accueillante avec moi . Tata se souvient que je suis quelqu'un qu'elle aime bien , mais ne m'appelle jamais par mon prénom ; je ne sais si elle me reconnait pas , ou si elle n'a pas envie de me reconnaître ; ça va durer deux jours . Au bout de deux jours , tout à coup elle me nomme , et demande des nouvelles de Philippe ...
Journées classiques à Nice , j'emméne maman promener au bord de mer , le long du canal ... elle va très bien , mais dès qu'elle n'a plus ses appareils auditifs , et même quand elle les a et qu'on n'est plus en face d'elle , on a des conversation du genre entre le capitaine Haddock et le professeur Tournesol . C'est assez éprouvant . Pas étonnant que M.soit énervée ; en plus son mari a le même problème ... ( lui , c'est de naissance ) En tout cas elle est toujours aussi patiente et gentille avec ma tante , je l'admire . Je dors mal la nuit , toujours inquiéte , Tata tousse beaucoup , j'ai peur que maman ne m'appelle pour se lever ... heureusement , j'ai emporté un autre Jim Harrison : " Retour en terre " . Je découvre avec ravissement que c'est la suite de " De Marquette à Vera Cruz " , et je trouve ce deuxième tome très proche de la perfection . Ca parle d'humains , mais il y a aussi des histoires d'ours , et j'ai adoré ça . Quelle liberté fabuleuse , je l'ai déjà dit voui mais je ne me lasse pas de le répéter ; et je me suis trouvée emportée dans ce vent de liberté - même au sein des insomnies ... Merci , Merci !
Conséquence - dont je devrais aussi remercier Jim Harrison ? le matin de l'anniv de Tata ( je m'étais trompée , c'est 102 ans et pas 103 ) je me suis éveillée , Dieu sait comment , heureuse , sentant que Tata a eu , elle aussi , une vie proche de la perfection . La perfection de ce qu'elle avait à vivre avec les cartes qu'elle avait en main , je ne parle absolument pas d'une vie remarquable au sens où on comprend généralement ce terme . Je trouve au marché une très jolie corbeille de fleurs , des tulipes feu , des primevères jaunes et rouges , que j'avais vraiment envie de lui offrir ; la veille , en manque d'invention , et d'énergie pour aller " en ville " , j'avais pris une cloche en chocolat au très chic Monoprix de Cimiez - tata est branchée chocolat en ce moment - qui a eu du succès ... et je me suis sentie très bien tout ce jour . Et elle aussi , à peu près je crois . Denise était venue , que Tata aime bien aussi ; en écoutant D. qui me parlait , j'avais l'impression que la personne à qui elle s'adressait - " moi " , en principe! - n'était pas vraiment là . J'étais d'abord gênée par ce sentiment , peu adapté à la situation que je vivais , parce qu'il se rattache à l'enfant que j'ai été , enfant que les gens autour ne voyaient pas vraiment . Et puis je me suis dit : après tout l'ego n'existe pas réellement ( on sait que ce n'est qu'une convention du langage mais on l'a oublié que c'était une convention ) donc pas la peine de se biler ...
Je suis repartie Samedi , jour du Printemps ; affreusement triste de les quitter , heureuse de partir parce que la vie avec elles est si difficile ... la veille au soir j'étais tirée très fort entre deux désirs incompatibles : profiter du trajet pour revoir le musée Fernand Léger qui a rouvert à Biot - j'adore Fernand Léger qui me donne de l'énergie ; ou bien aller manger avec J. à Aix à midi . Pour finir j'ai choisi de retrouver J . Ce qui était vraiment très bien , une bonne rencontre , mais j'aurais très fort voulu avoir les deux ...
Ensuite , j'ai poursuivi la route vers chez moi , écoutant King Arthur tout du long pour me mettre dans l'ambiance avant la répétition de Dimanche après-midi . Ouah ! génial , génial , génial ...
Dès que j'ai eu passé Nîmes , j'ai pensé que j'allais retrouver Philippe , ce qui ne m'apportait qu'un plaisir mitigé . Et j'ai commencé à me persuader qu'il serait en train de faire le ménage , comme souvent , juste au moment où j'arriverais avec un terrible besoin de calme -je- ne -veux- parler- à -personne -je -suis-fatiguée-fatiguée ...dans ma tête j'imaginais son attitude , mes réponses ( depuis quinze ans que je reviens de Nice tellement fatiguée tu devrais savoir que j'ai besoin de trouver une maison calme et en ordre ... ) et ma colère bouillonnait , bouillonnait ... j'étais furieuse ; mais en même temps je la laissais , en quelque sorte , partir du vide et revenir au vide . Puisque ce " je " n'existe pas . Les sentiments peuvent être intenses , mais il n'y a personne pour les ressentir . Juste un flux ...Inutile d'en faire une affaire personnelle .
J'ai ouvert le portail , je me suis garée , j'ai poussé la porte . Le ménage était fait ,la maison accueillante , le mec tout souriant ... tiens la colère était passée . Je ne sais où . Je ne lui ai pas sauté dans les bras , j'ai toujours très besoin de solitude et de m'enrouler sur moi en rentrant de Nice dans une quelconque tanière . Pourquoi pas ? je suis comme ça .
Et puis quoi ... le jardin est de plus en plus beau avec le printemps , le gars qui est resté ( Seigneur , ce qu'il peut être horripilant .. la moitié du temps je rêve terriblement d'être célibataire , comme je rêvais terriblement de ne plus vivre seule à une époque . Là aussi , je voudrais bien avoir les deux ) n'a pas oublié d'arroser , comme je le lui avais demandé . Ouf !
Et pour terminer ... cet après-midi de Dimanche la répét de Purcell était ... était tellement ... il y a des passages tellement , tellement ... quel bonheur . Bien sur , on n'est pas le Deller Consort . Mais quel bonheur .