A vrai dire , je serais tentée de relire des livres sur le Zen , tant la lecture des entretiens avec Ramana Maharshi m'y renvoie ... d'un autre côté , je me cramponne très fort en ce moment à ce que dit le Maharshi , donc n'ai pas envie de quitter mes racines ... je me contenterai donc de recopier , en fin d'article , une citation du bien -aimé Van de Wetering ( Un éclair d'éternité ) , un livre que je ne saurais trop recommander ; parce que j'ai bien eu besoin de me cramponner ce matin .
C'était hier le 11 , et mon anniversaire ; que pour plusieurs raisons nous avons célébré Samedi - à deux , Philippe et moi , ou encore cinq si l'on compte les bestioles ; et c'était une journée vraiment plaisante . Seulement maman , qui se souvient de tous les anniversaires , me l'a souhaité hier , comme il est normal . J'étais pressée , Nordine m'avait appelée pour des questions d'argent , mais on s'est embrouillés ,il voulait une avance et n'a pas osé me le demander tout de suite , ce qui a fait que j'avais du encore plus me dépêcher ; donc je passe chez maman pour lui remettre l'argent de la semaine , ( maman n'y voit plus assez pour s'en occuper elle-même ) , et à Nordine l'avance ; à toute vitesse , j'étais déjà agacée - à ce moment là je la vois qui s'amène avec son petit paquet mal emballé par ses soins : une eau de toilette dont le seul nom me fait frémir d'horreur , ça doit être Nordine qui l'a conseillée ... du coup je me suis trouvée happée par mes salades émotionnelles : agacement , il faut d'abord que je m'occupe des comptes de maman ce matin et de son courrier administratif donc j'en ai rien à foutre de ce cadeau , attendrissement : ta vieille maman enfantine te fait un cadeau qu'elle a tenu à emballer elle-même peuchère; une dose XXXXL de culpabilité : toi qui ne viens la voir que pour assurer le quotidien alors qu'elle aurait TELLEMENT envie que tu la sortes un peu , par exemple la monter en voiture vers le Pompidou ou l'Hospitalet ( une heure et demie de montée en voiture , elle aurait mal au coeur , elle aura envie de faire pipi ; mais elle ne peut faire pipi dans la nature ... et puis passer une journée avec elle en l'entendant me raconter une ( n+1 ) ème fois ses histoires que je connais toutes , l'entendre raconter à quel point les promenades en montagne autrefois c'était bien alors que pour moi à l'époque c'était le cauchemar , etc, etc ... on rajoute une autre une dose de culpabilité : elle s'est donné la peine d'aller acheter cette eau de toilette , alors qu'il fait chaud ... et en plus je n'accepte pas gentiment ce cadeau , je lui fais de la peine ... retour à l'agressivité , ça y est je suis encore en train de me faire avoir , je dois déjà assurer la bonne marche du quotidien et maman en veut encore , toujours , toujours plus ... du fond de son côté soi-disant une petite fille timide et misérable , timide et misérable my ass ... on mixe le tout , et hop ! c'est parti pour vingt-quatre heures de malaise infernal , avec le coeur qui pince ...
Bref , mes salades habituelles . Culpabilité surtout , malaise , qui m'ont tenu compagnie hier après-midi , cette nuit , et que j'ai trouvés sur mon oreiller à l'aube ...
Mais si j'ai retiré quelque chose de ce dernier voyage en Inde , c'est ça : la charnière après laquelle ,même si je retombe dans ces salades , je SAIS que ça n'est que du mental . Je SAIS , quelque part , même dans mon esprit embrumé , je SAIS qu''il n'y a rien de réel dans le sens de l'ego .
Et alors ... et alors , j'ai pu accéder une méditation incroyablement bienfaisante , ce matin -même . C'est peut-être ça , le vrai cadeau d'anniversaire ... un rappel de liberté .
" Tu as huit ans .C'est dimanche soir. On t'a permis de rester éveillé une heure de plus .
Tout le monde joue au Monopoly . On t'a laissé jouer avec les grands.
Tu perds .Tu perds sans arrêt. Tu as si peur que tu as des crampes d'estomac.Tout ce que tu possédais a disparu : la pile de jetons en face de toi et les maisons sur tes rues .Finalement , tu dois vendre la dernière . Tu dois abandonner. Tu as perdu . La sueur perle sur ton front .
Et tout à coup , tu te souviens que ce n'est qu'un jeu . Dans ta joie , tu renverses une grosse lampe. En tombant , elle entraîne la théière . On te gronde mais tu ris en montant l'escalier pour aller te coucher .Tu sais que tu n'es rien , que tu n'as rien. Et ce rien est une liberté immense .
Avec le temps , tu perdras ce sentiment , mais tu t'en souviendras toujours . Tu te souviendras qu'à huit ans tu connaissais la liberté . "
( Van de Wetering , Un éclair d'éternité , ed. Rivages poche , chap15 )