Hier : levée matin , matinée en grande partie consacrée à maman : sa toubib trouve qu'elle ne va pas trop mal , vu son âge .. Je suis étonnée par la somme de médicaments que me donne ensuite le pharmacien . L'un pour les reins , l'autre pour la tension , le troisième contrebalance les effets indésirables du deuxième .. bon , à 101 ans maman est une réussite évidente de l'allopathie , que moi je n'utilise qu'en cas d'agonie ; on peut aussi dire que c'est son karma .
Trois heures de l'après-midi : je m'arrache péniblement à la sieste bénie - le chat noir collé derrière mes genoux proteste , lui préférerait qu'on dorme encore plusieurs heures ensemble .. Je change de vêtements , et pendant deux heures épuisantes je m'escrime , suante et soufflante sous ces températures déjà estivales ( j'ai l'impression qu'on a eu en tout et pour tout trois jours et demi de printemps , passant à toute vitesse des bottines que j'ai gardées tout l'hiver , aux pieds nus dans les sandales ) pour construire une structure qui permettra aux pois gourmands " géants à fleurs violettes " de grimper allégrement vers le zénith . J'ai d'abord besoin de l'aiguille métallique pour enfoncer mes piquets ; je fouille tout l'atelier ,puis les deux appentis , je ne la trouve pas ; je vais demander à Philippe qui roupille à moitié , assis sous la véranda , il a du mal à m'expliquer , se dérange , tout ronchonnant ; puis , une fois l'instrument dégoté , je redescends avec le marteau et l'aiguille . Ensuite ... rebelote en ce qui concerne le filet , que je croyais avoir rangé moi-même ( le bonheur d'être avec un gars extraordinairement ordonné ! ); puis idem encore avec le raphia ...impossible de trouver le raphia .. je m'énerve , je m'énerve .. j'irai en racheter tout àl'heure . Bon . Montant , descendant , du bas en haut en bas à l'Ouest à l'Est du jardin .. sous la chaleur ...
Ensuite , contemplant avec inquiétude mon bricolage à la Jacques Tati ( cannes de Provence , bambous , filet coupé même pas droit , bouts de raphia et de ficelles variées , pas très beau ) .. je comprends - enfin ! comment j'aurais du m'y prendre . Enfin , ça me servira pour l'année prochaine .
eh oui , tout ces efforts pour arriver à ça .. ouais . Bon .
Ensuite , il commençait à faire un peu plus frais et agréable et j'avais commencé à tondre ; mais l'heure avait tourné , j'ai du abandonner le jardin à regret et tout ranger en hâte ( et Dieu sait que je déteste rembobiner la rallonge de fil électrique ) , m'habiller à peu près proprement et courir en ville - m'étant inscrite à un nouveau cours de yoga . Je suis partie en râlant tout ce que je savais , rouge et fatiguée .
Et alors ..
Alors ce cours , le troisième que je prends avec cet enseignant , est étonnamment ressourçant . Ressourçant au sens littéral : on me permet de tout reprendre à zéro , comme si je n'avais pas pratiqué yoga et méditation depuis une petite trentaine d'années . Et :
C'est passionnant . Passionnant , mais aussi revitalisant .. Je retrouve une façon de pratiquer qui n'est pas orientée vers la performance , pas plus vers le " plus beau " , que vers "le dos un peu plus droit et le ventre contre les cuisses " ou encore " tenir la posture du guetteur sur les orteils et les poignets " ( et qu'est-ce que j'ai mal aux épaules après le dernier week-end et le jardinage par là dessus) . Ou encore : me forcer à lire des bouquins sur le yoga qui ne me correspondent pas trop en ce moment .
Mais je constate que les mouvements très simples , beaucoup plus simples que ceux que je pratique d'ordinaire , le travail beaucoup plus en profondeur que d'ordinaire sur la respiration - que ça "me" fait un bien fou .de travailler comme ça . A moi , à ce corps ?
Et ce matin , passant la tondeuse vite vite avant la pluie , je me demande quel genre de yoga je veux pratiquer : celui de la formation , où je me sens souvent soit en position d'échec , soit en train d'essayer désespérément de mieux faire , de perfectionner encore et toujours sans que ça soit jamais bien .. un schéma d'enfance que je connais . Ou celui du bien-être et de l'intériorité - de la facilité ? ... Montent en tourbillonnant , du fond limoneux , de vieilles défroques jusque là englouties dans l'eau trouble : si j'arrête mes efforts , je n'arriverai jamais à émerger des bas-fonds de la médiocrité dans laquelle je croupis ( enfant , j'étais la médiocre de la famille , face à des soeurs aînées brillantes , soit par l'intelligence , soit par la vivacité d'esprit et l'humour . Et je crois bien que mes parents se considéraient eux-mêmes comme des personnes médiocres ... ) Monte la peur , incroyablement forte , une peur dont je ne me rappelais pas avoir éprouvé l'intensité . La peur de n'être rien . La souffrance d'avoir été considérée comme rien . Monte la compréhension de tant de mes comportements qui y sont attachés ... la liberté du choix paisible ne m'est pas encore donnée , mais cette émergence d'émotions oubliées en signale les prémices .
Quelle soirée fabuleuse j'ai passée ensuite ! d'un article à l'autre de ce blog passionnant découvert hier soir - et que je vous recommande à nouveau ! Que de pistes à explorer .. en Inde , au Japon , en Chine - dans le monde , et en France ... j'écoute une conférence , avec l'impression que le gars , dont l'érudition est incroyable , effleure quelque chose dont j'ai une espèce d'intuition ; qu'une grande partie de son vol de libellule ne m'intéresse pas , que je n'arrive pas à comprendre le reste par manque de culture philosophique - mais pourtant , c'est comme si je sentais qu'il va s'y trouver un expression , une phrase , sur une heure et demie que dure la causerie , qui sera comme une pierre précieuse ..
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