Ces jours-ci , je suis fatiguée au réveil ... fatiguée , non , c'est déprimée qu'il faut dire , le manque d'énergie et de courage au réveil ne vient jamais du corps physique . Tous mes efforts pour méditer sont inutiles , et je vois toute la journée , excepté le moment béni du cours de yoga , et tous les jours suivants , la répét de King Arthur ce week-end , la venue des cousins du Chili , comme une suite d'obligations en gris dramatique. J'essaie de me doper avec la tasse de café délicieux du petit dej et la succulente confiture d'oranges - cadeau de Maria ... Inutile encore . Je vois bien , mais sans pouvoir m'en décoller , ces alternances en moi , ces aller-et-retours entre déprime fatiguée et , plus rarement , colère et révolte pleines d'énergie , tout le paquet emballé c'est pesé avec la demande de maman . Demande qui s'est terriblement intensifiée , depuis qu'elle est à l'hôpital et se manifeste comme pauvre petite dame abandonnée - dés qu'elle me voit (?) - mais regonflée après chacune de mes indispensables visites . Je ressens ça comme un flux terrible , aspirant sans cesse ... je dois être là pour maman je dois être là pour maman pour qu'on m'aime je dois m'occuper de maman ... l'éternel conditionnement des filles , ou d'une des filles dans la fratrie . Certaines arrivent à s'échapper tant bien que mal , d'autres ont à faire cette prise de conscience et cette lutte perpétuelle .
Je me décide pour la recette imparable pour me vider la tête : jardiner . Mardi après-midi , revenant de l'hôpital avec le moral sous les semelles ( et pourtant mes sandales affichent la marque " la godasse rieuse " ) ,j'ai repiqué tous les plants de tomates qui restaient ( tout en me demandant comment je vais bien pouvoir caser les quatorze pieds que m'a donnés France , j'en donnerais bien certains , mais comme elle m'a donné une liste globale des noms de ces variétés rares , je ne voudrais pas en manquer une seule ...) après deux heures de ce jardinage soigneux , mettre le terreau dans les petits godets , ajouter la petite plante , remettre du terreau , donner un bain , ajouter l'étiquette pour les variétés dont je connais le nom - moral et tonus étaient rééquilibrés .
Donc , jardinage ... mes semis de courges et de potimarrons ne sont pas sortis au bout de deux mois , je ne sais pourquoi ,c'est la première fois que je les loupe en vingt ans ; je vais donc recommencer . Je jette un oeil au calendrier lunaire affiché sur le frigo , zut de zut ... c'est jour d'apogée de la lune , l'oracle est catégorique : " ne jardinez pas " . Ca n'est pas que je croie cent pour cent au jardinage avec la lune , mais tant qu'à faire vaut mieux mettre toutes les chances de son côté ... je me contente donc de couper les roses fanées . Ruminant des pensées déprimées ... et puis , les pieds dans la masse vaporeuse des gaillés qui embaument la vanille , le nez dans les pétales du rosier " Arlequin " - comment rester déprimée ... braves petits rosiers , il leur suffit de terre , d'un peu de fumier , d'eau , de lumière , et comme ils donnent ... comme ils donnent ...