Vous vous souvenez que j'avais écrit un article enthousiaste , ayant découvert par hasard sur la Toile une méthode pour les accros aux sucreries ayant des velléités de se désintoxiquer ; méthode combinant sophrologie et tapotements sur le corps ( http://www.petites-peintures.com/2016/05/chapitre-2006-et-l-avidite.html. ) . Eh bien , me réveillant de la sieste l'autre jour , j'ai eu envie de manger du chocolat .
J'ai été voir dans la boite en métal : il y en avait une tablette et demie .
J'en ai pris un carré . Juste un .
Et voilà .
Je n'avais pas envie d'un autre carré . Et je n'en ai pas pris de deuxième , encore moins de troisième . D'ordinaire , non pas que je mange toute la plaque , mais je dois me tirer par les bretelles pour m'arrêter au bout du sixième . Curieux ...
Alors , je me suis demandé si c'était à cause de cette méthode ( que je n'ai pas poursuivie , j'ai eu la flemme ... ) ou de la chaleur .
Ou encore .. c'est peut-^^etre quelque chose qui m'est arrivé à Salamanque .
Voilà : je ne sais pas si vous connaissez le chocolat chaud façon espagnole , mais pour moi , c'est LA spécialité gastronomique que je recommanderai à tout un chacun , en cas de légère déprime , aussi bien que pour accompagner une bouffée d'optimisme matinal ou un passage morne vers les cinq heures de l'après-midi . Bref : dans tous les cas . Sauf , bien sur , si c'est la canicule ...
Et , je vous l'ai dit , pour moi qui craint la chaleur , tout s'était extraordinairement bien goupillé c^^oté météo ( ouh là ! décidèment , il y a un sacré problème avec la touche " accent circonflexe " depuis hier ; je me demande si on ne va pas ^^etre obligés d'acheter un nouveau clavier pour l'ordi ... quelle tristesse .) Donc , on a pu voyager dans un moment béni , avec tout le temps une température agréable , et de ce fait propice à la dégustation de cette bouillie tiède où la cuillère tient debout , hyperchocolatée , peu sucrée mais merveilleusement régressive , que les espagnols appellent chocolate ( on peut se passer des churros à moins d'^^etre vraiment sur qu'ils sont frais ... ) . Quoi de plus agréable pour le petit dej qu'une grande tasse de chocolat en contemplant les arcades de la plaza Mayor ...
Or, après Madrid , on avait fait étape à Salamanque . Salamanque , la belle , la fière , la poétique , aux inoubliables architectures de sable rose et de dentelle ... On y a mangé , le soir , dans un beau restau , qui n'était pas un snack : c'était étonnant . La bouffe la plus abominable , la plus immangeable , que j'ai jamais goutée en Espagne ; et pourtant d'autres souvenirs de repas se pressent dans le peloton de tete , mais là , non , ce restau gagne haut la main la coupe du pire ... Tout ce que ces braves gens arrivent à faire avec de simples pommes de terre , de l'eau et un chouïa de matière grasse ( du lard rance ? mais là , je suppute ) , c'est vraiment fabuleux ... ou encore , des oeufs et un peu de farine , et ça réussit à etre parfaitement écoeurant ( et dans ce dernier plat , le lard rance était-il présent , ou non ? ) au point que je tremblais d'angoisse en pensant que le serveur allait arriver avec son grand sourire , apportant un plat supplémentaire . Et qu'on ne m'objecte pas que c'est de la nourriture de pauvre . De la nourriture de pauvre , j'en mange tous les jours : tomates crues , ou patates à l 'eau avec trois grains de sel , ou encore aïgo boulido l'hiver .. la nourriture de pauvre , ça peut ^^etre délicieux . Non , non , là , c'était de la nourriture du terroir - mais , ignoble .
On a fait passer le mauvais repas en baladant dans la nuit tiède , autour de la Cathédrale . C'est pas grave , c'est ce qui rend un voyage pétillant . Et puis , on avait à peine touché aux plats , donc leur digestion n'était pas trop difficile ...
Mais le lendemain ... Ah . Le lendemain . Le lendemain : on est retournés à la Cathédrale , et on a visité , en plus , l'ancienne cathédrale , fort belle aussi , plus trapue et plus simple ; puis la Faculté ; puis , on s'est promenés tout à loisir .. Pour clore la matinée , en guise de repas de midi , on s'est arr^^etés dans une ruelle à l'ombre pour déguster un chocolat . Mes amis , ce chocolat ... LE chocolat . Un chocolat ... historique . Le meilleur chocolat chaud de toute ma vie . Le chocolat dont je me souviendrai sur mon lit de mort ... et les churros venaient d'être faits , tout chauds tout bouillants ... impossible de leur résister .
Dieu sait que je l'ai apprécié , dégusté , ce chocolat , que j'en ai joui gorgée après gorgée ... , que j'ai sucoté ma cuiller jusqu'à ce que le métal fonde dans ma bouche , que j'en ai pris une deuxième tasse , et que j'ai encore raclé les bords de celle de Philippe ensuite ...
Mais la nuit d'après , j'ai fait un r^^eve comme je n'en avais jamais fait : j'ai r^^evé , r^^evé en r^^eve , que je mangeais du chocolat . Deux bo^^ites de chocolats , l'une , de chocolats au lait et l'autre , de chocolat noir . Ca ne m'était jamais arrivé de faire de rêve de ce genre ; cauchemars oui , rêves merveilleux oui , rêves bizarres oui , rêves symboliques oui , rêves érotiques quelques-uns ; mais , rêves gastronomiques ? certes , jamais ...
Et dans ce r^^eve , je n'avais jamais mangé du chocolats aussi exquis . Je les mangeais , sans précipitation , avec bonheur , les uns après les autres ; et je ne finissais même pas les boites . Mais ensuite , ou maintenant dans ce que j'appelle la " réalité " : je me souviens encore du go^^ut de ces chocolats r^^evés ; et je peux jurer que je n'en ai jamais mangé d'aussi bons ...
Alors voilà ; c'est peut-^^etre pour ça que je n'ai plus eu envie de chocolat l'autre jour .
Mais ceci dit - je n'ai pas perdu un gramme ..
j'aime bien les deux piétons ... un couple d'hommes , il y avait , je crois , une dame aussi , qu'on ne voit pas ; ça pourrait être nous , dans quelques années ( Philippe a encore des cheveux .. )