Comme je vous le disais il y a pas longtemps , je viens de me relire le guérisseur de cathédrales , encore un immortel chef d'oeuvre de Philip K . Dick , ça doit faire le cinquième livre de lui que j'ai relu en quelques mois , (La vérité avant-dernière , Le Dieu venu du centaure , Robot blues ( les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ) , Dr Bloodmoney ) histoire de renouer connaissance parce que j'ai grandi depuis la dernière fois que je les avais lus . Je pense que je vais arrêter , ou peut-être un petit dernier à la rigueur , où il y a le thème du double: Flow , my tears , the policeman said . J'avais peu apprécié le guérisseur de cathédrales la première fois que je l'ai lu , c'est pas un bouquin réussi à cent pour cent , je trouve que certains passages gagneraient à être plus développés ; mais il est quand même extraordinaire . Pour moi , c'est l'histoire symbolique d'une réunification de la personne .( comment est-ce que Jung appelait ça , déjà ? l'individuation ? ) Le héros principal est comme toujours un petit mec pas très glorieux et dépressif , coincé sans issue dans une société abominablement aliénée et fliquée ; celui-ci est guérisseur de poteries , le meilleur dans sa spécialité . Pour guérir une poterie , il faut qu'il en ait tous les morceaux ( le côté obsessionnel de Dick ! ) Le voilà recruté de façon bizarre par un extraterrestre presque tout-puissant , le Glimmung , pour aller sur une planéte lointaine aider à la résurgence d'une cathédrale engloutie sous la mer . ( ça c'est un symbole magnifique , la réunification du Moi , on fait une plongée dans l'inconscient -océan assez effrayant pour que resurgisse un Moi plus apte et lumineux - presque le symbole d'une psychanalyse ! Là ça devient de plus en plus confus , ce Glimmung colérique , fantasque , tout puissant , ne l'est pas totalement , son pouvoir est limité , entre autres , par un livre ésotérique et cryptique , le livre où tout est écrit dans le désordre , passé , présent et avenir ; le héros ( Joe Fernwright ) plonge sous la mer , c'est assez éprouvant comme expérience , découvre entre autres horreurs qu'il y a un double noir de cette cathédrale de lumière , ainsi qu'un Glimmung noir assez déplaisant ... confrontation avec l'Ombre , celle de la cathédrale , celle du Glimmung . Mais ça finit relativement bien , la cathédrale lumineuse émerge sur la terre ferme ( le moment où elle émerge est décrit de manière très cinématographique , elle passe par un stade où c'est un ( une ) enfant nouveau-né ( on sait que Phil .K. Dick avait une soeur jumelle , Jane , morte à quelques semaines , aussi le symbole d'une petite fille est particulièrement positif pour lui . Ceci dit , il me semble que cette cathédrale , comme l'enfant nouveau -né , est un archétype universel que chacun chacune peut s'approprier ) Alors tout va bien ? non , sur le plan amoureux , ça capote pour Joe qui laisse son amour , son anima , la belle extra-terrestre , le quitter pour rester fusionnée à l'intérieur du Glimmung ; dans sa réalité quotidienne il en sera à jamais séparé ... finalement il décide de créer une poterie nouvelle , plutôt que de passer sa vie à guérir des vieilles ; et sa première oeuvre originale est : immonde . ( mot de la fin et reflet de l'opinion que Dick se faisait sur lui-même en tant qu'artiste , à ce moment là ? )
Ce Glimmung capricieux , presque tout puissant ... à quel âge un enfant s'imagine t'il tout puissant ?
Tous ces thèmes , ça vous fait penser à quoi ? mais bien sur , relisons le cycle de l'Incal de Jodorowsky et Moebius , que tous les amateurs de BD qui ont mon âge connaissent par coeur ... Jodo s'est surement nourri de Dick ! parce qu'il y a plein plein plein de péripéties et de symboles dans le récit de Dick qui sont reprises et développées , quel bonheur , dans l'Incal . Dont le héros est assez Dickien ,plutôt anti-héros fort peu glorieux , mais qui s'individue au fil du récit et des ( 5 ou 6 ? je ne me souviens plus ) tomes ( N.B : me souvenir de relire l'Incal , notre grand mythe fondateur à nous qui approchons de la soixantaine ...)
Et en plus , et surtout : c'est bien écrit , parce que Dick est un bon écrivain même quand il baclait à toute vitesse , carburant aux amphétamines , et c'est bien traduit par Marcel Thaon , ( sauf que je m'interroge sur le nom de la cathédrale , Heldscalla , que je traduirais plutôt comme si c'était Hell does call us , l'Enfer nous appelle ) qui était prof de psycho à Aix en Provence (mais à Aix les Lacaniens et Freudiens avaient assasinés tous les psys d'autres tendances , alors que ce bouquin est Jungien non ? ) J'insiste un peu parce qu'en cherchant des critiques sur la Toile , j'en ai rencontré une qui m'a agacé , le p'tit gars n'avait rien compris . Trop jeune . Mais j'étais de mauvais poil et j'ai mis un commentaire un peu acerbe .
Bon ,alors moi j'ai fait une toute petite peinture pour mon individuation personnelle ...
moi et mon ombre dépressive
bonne nuit , portez vous bien , prenez soin de vous .