La ballade avait commencé bizarrement ... décidée à abandonner , pour ce Dimanche tout au moins , mon personnage de serpillière dépressive , j'ai proposé à Phil une promenade d'un côté où on ne va pas souvent , le long des rails d'anciennes voies de chemins de fer pour les mines de charbon . C'est le côté nostalgique qui m'attirait ... une ballade champêtre au calme pour se changer les idées . On a emprunté une petite route en fond de vallée , pestant contre quelques fadas qui descendaient à fond la caisse , genre rallye de Monaco du pauvre . On a laissé notre voiture dans un village qui était autrefois , nous a dit le topo , un centre minier surpeuplé ; maintenant à part ces bagnoles qui faisaient ronfler leurs moteurs , c'est plutôt désert . Pour de la nostalgie c'était vraiment de la nostalgie ...
Nous sommes partis sur un chemin plat et ombragé , on voyait encore les rails de la voie ferrée, qui avait été aplanie pour la changer en chemin piétonnier . Acacias et sureaux en fleurs , pour un oui pour un non une pluie de pétales parfumés d'un blanc crémeux voletait autour de nous ... déjà je me sentais moins triste . C'est alors que , voulant mettre en pratique la philosophie proposée par Hélène et sa chanson de Souchon l'autre jour , je me suis retrouvée par terre après avoir gracieusement roulé sur la fesse et l'épaule gauche .. ma cheville droite avait brusquement décidé de ne plus être fiable . Bon , je recolle les morceaux , je léche mes blessures et j'épousséte mon pantalon ( blanc , l'idéal quand le chemin est en terre brune boueuse ) et on repart ... on serpente entre des flaques d'eau gigantesques qui occupent presque tout le chemin , et d'anciennes fondations de mines , ou d'usines , d'énormes poutres de fer toutes rouillées , des fosses , des architectures en demi-ruine ... , pendant ce temps dans la vallée étroite les voitures ronflent et gémissent de plus belle , l'écho se répercute sur les parois et on a l'impression que les pots d'échappement ( trafiqués ) hurlent tout contre nos oreilles ... flaques d'eau , usines abandonnées , hurlement de moteurs , là c'est plus de la nostalgie , ça devient carrément déplaisant .
Bon , on décide de changer de cap , il est où ce rallye , sur Saint-Ambroix probablement ? Il va être midi , je propose de redescendre , d'acheter quelque chose à manger dans une boulangerie de Bességes , avant d'aller chercher un peu de paix , plus loin , plus haut .Dés l'entrée dans Bességes , c'est le saut dans les flammes de l'enfer : les voitures hurlent , nous dépassent comme en pays conquis , il y en a dans tous les sens , partout des stands avec des gens en combinaison et casquette à visière en couleurs tape -à- l'oeil, très affairés ...la place est à eux , les simples promeneurs n'ont qu'à se barrer . On redescend vers la vallée de la Céze , serrés par les fous du volant , devant , derrière , sur le côté ... ( dans ces cas là j'ai apprécié que Philippe devienne d'un coup le conducteur le plus vertueux du monde , il s'est mis à respecter scrupuleusement les limitations de vitesse dans les villages et j'imaginais avec délices le gars de derrière, le même qui fasait ronfler son moteur en furie , maudissant les crétins de devant ( nous ) ...
Tiens , à gauche , un petite route marquée " Gagnères " , on ne sait pas où c'est mais ça a l'air calme au moins ... on roule un peu , le rallye ne suit pas ... ouf ! traversant le village tout en longueur , la pancarte d'un restau , le Terminus , le bien nommé ... dès que j'ai vu l'endroit , une ancienne gare , les chiens énormes échoués comme des baleines affectueuses , les chats sympathiques dont un , tout propret , en train de faire sa toilette sur la nappe à carreaux , les tables installées au milieu de ce qui était la voie ferrée , autrefois , - j'ai su qu'on avait trouvé un havre et que j'allais enfin pouvoir passer une bonne heure à rêver aux gares d'autrefois , avant de pouvoir aller marcher tranquillement dans les collines couvertes de pins et de chataîgniers ... Enfin !