C'était un vieux rêve de Philippe : assister à une représentation à l'opéra de la Fenice . Nous étions à Venise le soir où la Fenice a brûlé , en 1995 je crois ; nous étions dans une petite ruelle , le bout de la ruelle était barré , il y avait de l'agitation , de la fumée , les pompiers - ai-je vu le reflet des flammes , ou l'ai-je rêvé ? Mais depuis la salle a été refaite à neuf , et par chance on a pu avoir deux places , au dernier moment . Chance surtout pour moi , car c'était un ballet - la Belle au bois dormant - , Philippe aurait bien sur préfèré un opéra , Verdi si possible . J'ai été enchantée par la représentation , malgré que ça soit de la danse hyperclassique et attendue , à la chorégraphie codée , un peu figée , comme la Belle , depuis cent cinquante ans ; les costumes , les décors - le palais du roi , la forêt - étaient parfaits , la plupart des danseuses étaient agiles , la musique attendue rrrrrrrrrrromantique à souhait , avec Tschaïkovski , vous pensez ... , les tutus couleur pastel virevoltaient ... Le seul détail un peu étrange était le costume du Prince Charmant ; déjà ce dernier offrait aux regards un arrière-train musclé , évoquant plutôt un charolais de concours agricole qu'un danseur étoile aérien , mais en outre il était mis en valeur par une veste trop courte portée sur un collant blanc tellement moulant qu' on se demandait avec inquiétude quand le collant allait éclater . Vous me direz , ça ajoutait un intérêt supplémentaire à la représentation . Certes , mais ...