Eh oui .. J'avais bien pris conscience , hier ( pendant cette solide crise de désespoir qui n'est parti qu'en toute fin de journée ) , j'avais bien pris conscience que là où le bat me blesse , ( et l'expression convient tout à fait , puisqu'il s'agit de l'empreinte reçue qui me fait me charger de tâches toujours démesurées ) donc , là où le bat me blesse ( j'espère que vous vous y retrouvez dans cette phrase pleine d'incidentes . Ou peut-être que vous faites comme moi , vous sautez .. ) c'est dans le passage du quotidien en voyage , léger et pétillant , au quotidien ici ... plein d'obligations . Philippe prétend que je me les crée .. Voui , certes ; mais que deviendrait le jardin , comment feraient les plantes et les fleurs , si je ne m'en occupais pas ?
Ce matin , une douleur aigüe sur certains mouvements ( genre sciatique , une grande première pour moi ) m'a empêchée de maintenir le rythme frénétique de jardinage que j'avais soutenu tout au long de la journée d'hier . J'ai continué à travailler , mais à une allure de petite vieille , prenant conscience de la sensation , de la position du pied à chaque pas , de celle du bassin à chaque fois que j'arrachais une mauvaise herbe - lentement , lentement . Et je n'ai rien porté de lourd - pas question de jongler avec le sac de quarante litres de terreau cette fois-ci , ni de faire pivoter la grande tondeuse .
Et tiens , j'ai beaucoup moins mal ce soir , du coup . Je n'ai planté que quatre pieds d'aubergines greffées dans tout l'après-midi - je sais , c'est trop quatre pieds , mais j'adore ça les aubergines - et semé quatre graines de courgettes ; pas le top de l'efficacité ; je dois dire que ça m'impatientait souvent d'aller si lentement . Mais ensuite j'ai pu faire , en marchant presque normalement , le tour du jardin au coucher du soleil , l'appareil photo à la main . Le potager commence à avoir un air de potager , les tomates poussent , et les plants de poivrons attendront demain . Les roses sont encore ravissantes : ce rosier , de la même couleur que la robe des Swamis , provient d'une toute petite bouture donnée par France il y a quelques années ; il est maintenant aussi haut que moi . J'adore ses merveilleux pétales lumineux , gaiement festonnés au bord comme des jupes de fête . Bon , je suis de nouveau en amour avec le jardin . Grâce lui soit rendue ..et à cela qui fait pousser les plantes , cela qui a créé de toutes pièces une femme qui jardine pour s'en occuper ...