Je viens de découvrir , grâce à Sylvie des Landes , un roman au style enthousiasmant , alerte et ironique , de Jean-Paul Dubois ; intitulé : Succession . Une histoire terriblement thérapeutique ... que j'ai dévorée ... jusqu'à sa triste fin . Fin misérable , qui m'a prise complétement de court ; et désolante d'autant plus , que j'étais entrée en amitié avec le personnage principal ...
Pour me changer le moral , parmi des volumes pris à la bibliothèque , il y avait " Journal intime d'un chat acariâtre" , un tout petit bouquin très drôle , que je recommande à tous amis des chats ; puis , Eva Trout , d'Elizabeth Bowen . Très british , celui là , avec des phrases que j'ai adorées ; mais les personnages sont un peu trop compliqués , certains un peu trop manipulateurs , de façon un peu trop subtile pour moi ; il faut que je relise trois fois pour comprendre une allusion qui passait inaperçue comme une toute petite plume voguant anonyme , presque insoupçonnable au milieu des buissons d'un paragraphe , et qui rend lumineux un chapitre autrement incompréhensible ... Faut dire , j'ai , depuis toujours , tendance à sauter plein de mots à première lecture . Pourtant , ce portrait d'une jeune femme un peu paumée , un peu cinglée , me fait penser à ma propre jeunesse raide et incohérente : " elle passait à travers les choses , droit devant , comme on dit d'un fantôme qu'il passe à travers les murs " . Droit devant ... Oui , ça ressemble à mon moi d'avant . Par ailleurs , quelques descriptions faites avec une légèreté de patte de chat , sensuelles et légères - de paysages , d'atmosphères - tout ça me donne envie d'aller explorer un peu plus le monde de Mrs E. Bowen .
Une fois ce troisième volume terminé , ( une fin pas trop gaie , mais d'une certaine façon pas trop triste non plus ... ) c'est le cœur tout neuf et innocent que j'ai ouvert " La Bibliothèque des cœurs cabossés " de Katarina Bivald ... Un livre feel good : écrit de façon simple et agréable , bien que pas exceptionnelle ; peut-être malicieuse , mais la traduction , je crois , pourrait être meilleure ( c'est traduit du Suédois ) . L'histoire fait un peu penser au film Bagdad Café ou à La Cité des Cloches d'Elizabeth Goudge ( un livre qui est un vieil ami à moi ) . Par contre , ce qui est fabuleux , c'est l' amour immodéré des livres , de tous les livres , que transmet l'héroïne ( et l'auteur ! ) ; et ça , c'est cadeau .
Après avoir épuisé ce dernier roman - aaaahhhhhhh ça finit bien , enfin ! fin vers laquelle on s' achemine cahin caha , trainant avec soi tous les wagons , un peu pesants et attendus quand on atteint mon âge , des conventions du genre ... je n'avais pas du tout sommeil ; dans l'exaltation insomniaque qui suit la grande tristesse morne des deux -trois heures du matin , m'a pris l' envie d'écrire ; puisque tant d'auteurs peu originaux , et même tout à fait moyens , écrivent des livres . Bien sur , j'écris déjà ici - mais j'ai pensé à écrire des histoires . Je sens parfaitement que je n'ai pas l'étoffe pour écrire un nouveau Guerre et Paix , soyez rassurés . Mais peut-être , des histoires courtes , dans le style de Grace Paley ou Caherine Mansfield ... Même si le désir , autrefois lancinant , de voir mon nom sur le titre d'un livre me parait tout à fait étranger et inintéressant . Donc , j'ai essayé d'écrire le dernier article de ce blog comme si je racontais une histoire à quelqu'un ; je pensais avoir fait un travail correct et j'étais relativement satisfaite - et puis , grâce au commentaire de Jyoti , je me rends compte que ... écrire une histoire , même courte , tout au long , et pas simplement une lettre un peu décousue comme celle que je vous envoie ici , c'est pas si facile ; manipuler les temps des verbes , notamment , c'est sacrément délicat . Ouh là !
Allez , la pluie se fait intense , des gouttes d'eau assez grosses tombent du balcon sur l'arrosoir en zinc en chantant une petite chanson tout à fait sonore , et gaie ; tant mieux pour la nappe phréatique et le semis de roquette que j'ai fait dans la matinée ; tant pis pour la promenade à Nîmes que nous avions prévue . Je vais retourner , en compagnie de Baptistounet qui hiberne sur la couette , vers une vieille amie ...
Comme ce monde devient de plus en plus affreux , dur et matérialiste , on doit rappeler que les vieux contes de fée prennent racine dans le vrai , que l'imagination a de la valeur , que les fins heureuses arrivent , en fait , et que la brume bleue du printemps , qui fait paraître belle une rue laide , est tout aussi réelle que la rue elle-même .